Nous avons demandé à plusieurs dirigeant.e.s du Podcast français de prendre la relève de notre article initial et d’y apporter leur précieuse expérience de l’année 2020 écoulée.
Une année forcément spéciale mais qui a pu confirmer, malgré les heurts et les freins, un mouvement ininterrompu du développement du Podcast en France.
Studios, hébergeurs, régies… Nous sommes ravi.e.s de vous proposer ces éléments. Chaque tendance est signée par son auteur ou autrice. Très bonne fin d’année 2020, et en avant Guing… 2021.
De la priorité à la création et aux contenus…
En 2021, nous attendons avec impatience la mise en place des premières mesures de soutien à la création pour les auteurs et producteurs de podcast français, et espérons donc avoir une place dans les ambitions audiovisuelles du gouvernement.
C’est aussi le moment où vont arriver les innovations en terme de distribution, avec les algorithmes de recommandations personnalisées, le développement du speech to text pour optimiser l’indexation des contenus, et une frontière entre l’audio parlé et la musique à la demande qui va petit à petit s’estomper…
Joël Ronez, président et co-fondateur de Binge Audio
Mêmes échos mais aussi des nuances du côté de Louie Media :
Pour 2021 nous attendons le développement et la poursuite de la reconnaissance du podcast comme une industrie culturelle à part entière, ce qui a été amorcé avec le lancement du PIA, les accords passés avec la SCAM par les studios, la sortie du rapport Hurard. Mais cela doit être accéléré et aller de pair avec des innovations éditoriales fortes.
Pour continuer de développer cette industrie, les institutions, les plateformes, les studios et les auteur.ice.s doivent conjuguer leurs forces et permettre l’émergence d’oeuvres permettant de rivaliser avec les autres médias. Le podcast est une nouvelle industrie mais elle doit d’abord innover et investir dans les contenus, avant même les usages (distribution, data, algorithmes de découvrabilité etc), pour attirer de nouveaux auditeurs.
Charlotte Pudlowski, présidente et co-fondatrice de Louie Media
Un constat que partage l’hébergeur Ausha, qui explique que les créateurs restent malgré tout préservés pour l’instant, tandis qu’une menace plane au-dessus de la distribution :
Jusqu’à présent le marché du podcast est très atomisé, tant dans la diversité des acteurs dans la création de contenus que dans les nombreuses solutions d’écoute. C’est ce qui fait la beauté de ce canal où le contenu est encore roi et les espaces d’échanges assez libres. Dans le podcast, les créateurs sont relativement préservés de la pression des distributeurs contrairement au monde de la vidéo où on a pu observer qu’une fois que Youtube avait dominé le marché, tous les créateurs devenaient dépendants des règles du jeu que la plateforme vidéo leur imposait.
Mais ces derniers temps, nous observons dans le paysage du podcast, des effets de concentration de pouvoirs avec les nombreuses acquisitions qui risquent de tendre vers une situation monopolistique et donner toutes les cartes entre les mains d’un seul et même acteur. Le risque qu’on peut prédire est de porter préjudice à la liberté des créateurs de podcasts et donc le perdant final sera toujours l’auditeur. Vive le podcast libre !
Maxime Piquette, CEO Ausha
Cette priorité à la création, on la retrouve également du côté de Podcastics (également hébergeur) et des agences interentreprises comme Tootak : même en B2B, c’est le grand public qui concentre toutes les attentions.
De la création à la diffusion, on va assister à une professionnalisation des acteurs au fur et à mesure que le secteur deviendra solvable. Il manque encore de très grandes voix de très forte notoriété qui viennent sur ce média comme hôtes pour qu’il devienne plus grand public et accélère son évangélisation.
Pour les professionnels du marketing, de la communication ou de la formation, « audiotiser » son contenu doit devenir aussi populaire et naturel que le digitaliser.
Pierre Denis, CEO Tootak
Je pense que nous allons assister à l’émergence de nouveaux talents créatifs, qu’il s’agisse d’auteurs ou de sound designers, pour diversifier encore un peu plus les formats. C’est l’une des forces du podcast : à chaque fois qu’on se met à croire que tout a déjà été fait, quelqu’un lève le doigt avec une idée qui révolutionne l’exercice.
Laurent Dumont, CEO Podcastics
Il y a une aspiration à la liberté qui pourrait chambouler certaines habitudes, et pourquoi pas réduire la place occupée par les écrans au profit de l’audio. Le succès des podcasts de contes laisse d’ailleurs penser que de plus en plus de parents préfèrent initier leurs enfants au podcast plutôt que de les installer devant une TV. Idéal pour stimuler l’imagination !
… À la poursuite des audiences et de la monétisation
L’autre groupe de tendances qui se dégage est celui consacré à l’audience (les mesures d’écoutes) et à la monétisation des contenus. Des évolutions détaillées par Audiomeans et Audion, qui proposent des solutions dans ces domaines.
Avec toujours plus de créations et une démocratisation des usages, le nombre d’écoutes des podcasts natifs devrait montrer à nouveau une croissance dynamique en 2021. L’écosystème sera en outre stimulé par la compétition entre les géants du numérique qui s’intensifie avec la poursuite de l’offensive de Spotify et des mouvements significatifs d’Amazon et Google qui viennent challenger la position d’Apple. La monétisation va prendre de l’essor et se diversifier dans ses formes entrainant la professionnalisation de l’activité de Podcaster.
Outre le marché publicitaire qui devrait franchir un nouveau cap avec le positionnement de nouvelles régies et la prise en main par les annonceurs et les agences du media podcast, d’autres leviers de monétisation vont s’affirmer. La rémunération des droits et le fenêtrage seront au centre des débats car de plus en plus d’acteurs veulent des contenus exclusifs et/ou constituer des catalogues originaux. Mais en termes de monétisation, 2021 sera surtout marqué selon moi par l’arrivée dans le paysage d’offres communautaires payantes sans intermédiaire alliant l’audio et l’écrit à l’instar de ce que propose depuis peu Binge Audio avec La Dose.
Olivier Ou Ramdane, CEO Audiomeans
La première tendance va être d’apporter de la visibilité et de la clarté dans un marché de plus en plus riche en matière de contenus. En effet, le podcast dit natif attire une grande partie de la visibilité du marché global de l’audio digital, alors que ce dernier n’en représente encore qu’une infime part des audiences en France. Un travail de fond s’effectue en ce moment même autour des principaux instituts d’études du marché (médiamétrie, kantar), il est très probable que l’on assiste enfin à une structuration nécessaire du marché.
La seconde tendance tournera autour de la croissance des audiences du podcast en France. Média radio, média de la presse écrite, podcasteurs natifs, tous ont créés et développé de nombreux contenus sur les 24 derniers mois avec un business modèle à 100% tourné sur la publicité. Le marché publicitaire est dans une logique de reach et d’audience, à laquelle ne répond pas encore, ou peu, le marché du podcast.
Visibilité, technologie…. Il est fort à parier que de nouvelles innovations vont accompagner la croissance des audiences du marché !
Kamel El Hadef, Co-fondateur d’Audion
Pour finir, un grand merci à ces différentes voix d’avoir répondu présent — en un laps de temps très court — à cette invitation.
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