La cruauté du monde de l’entreprise est le thème au cœur du récit de Pensez Printemps. Une fiction audio de Mehdi Bayad en six épisodes d’une dizaine de minutes chacun, qui aborde différents thèmes professionnels avec le personnage d’Ariane comme fil conducteur (évidemment).
C’est donc Ariane qui explore les dérives et les aberrations des entretiens d’embauches, du télétravail, de la novlangue en entreprise… sa naïveté et sa candeur sont les ingrédients ayant pour objectif de déclencher notre empathie alors que le personnage se retrouve confronté à la violence de la machine à café (capitaliste, libérale, comme vous voulez).
Si certains épisodes souffrent parfois de quelques longueurs, grâce à une production incisive plusieurs critiques du système sont intelligemment réunies dans l’épisode 3 intitulé Concepts. Dans cet épisode, un faux quizz à la manière du jeu télévisé Questions pour un champion oppose deux candidates (dont notre Ariane) autour de notions modernes de l’économie (les dividendes…) ou de législations encore en vigueur, et qui amène forcément l’auditeur à la réflexion.
Pensez Printemps et ressentez ce climat anxiogène
Mehdi Bayad est un auteur français installé en Belgique, connu pour ses productions Lumière Noire, Bisous à demain, Rouge Vif ou Multicolore. Il a développé son style d’écriture critique, ironique et sombre, avec la capacité de produire entièrement seul ses fictions ou de s’entourer d’un groupe, comme c’est le cas avec Pensez Printemps qui possède de loin les crédits les plus longs jusqu’à présent (depuis Nuit blanche, sa première production). Mehdi Bayad intervient notamment dans Pensez Printemps avec le personnage d’Omar (de l’épisode 5 Violence) où il incarne un livreur Uber qui dépeint ses conditions de travail. Des conditions réelles vécues tous les jours par des milliers d’employés Uber, qui oblige au minimum à réfléchir sur ce que l’on finit par accepter dans notre rapport au salariat.
Pensez Printemps réussit son défi d’installer un climat anxiogène chez l’auditeur, le genre d’atmosphère que l’on peut trouver dans la série télévisée Black Mirror par exemple. En effaçant petit à petit la frontière entre fiction et réalité (par exemple un faux sponsor soutient souvent le début de chaque épisode), Pensez Printemps immerge son audience pour mieux l’inviter à se révolter sous prétexte de la divertir. À vous de voir — ou plutôt d’écouter — si le message est passé.
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